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Che si asciuga… de Joël Paul

Che si asciuga le castagne ora ?  de Joël PAUL


Prix 2011  de l’Association des bibliothécaires de la Province Nord

 

 

Assis sur son banc du petit square de la rue Taragnat Tony Vincenti rêvassait pour tuer le temps. Il appréciait ces rêveries entre veille et sommeil qui lui permettaient de s’abstraire de la réalité et de voyager dans son passé pour revoir la mamma. Lorsqu’il avait quitté le giron familial, elle l’avait traumatisé en lui hurlant : « qui va sécher les châtaignes maintenant ? ». Une phrase qu’elle avait répété jusqu’à ce qu’il eu disparu derrière l’horizon emporté dans la charrue bringuebalante d’un brave voisin paysan. Le cri de douleur et le chagrin de sa mère restait gravé dans sa mémoire.

 

Tony avait quitté sa région des Pouilles vers la fin des années cinquante pour faire fortune avec pour seul bagage l’insouciance de ses dix-huit ans et la volonté de sortir de la grande pauvreté qu’il avait connu depuis sa naissance. Il s’appelait Ennio en vérité, mais il avait décidé de changer de prénom rapport à un oncle qu’on disait mafioso à New York. Tony sonnait italien des States, c’était mieux que spaghetti, rital ou macaroni. Les immigrés italiens avaient tous des sobriquets dans leurs pays d’accueil. Tony symbolisait pour lui l’italien respectable. Tony Vincenti avait décidé qu’il serait respecté, décidé de ne pas rester dans son village du talon de la botte italienne à surveiller le séchoir à châtaigne toute sa vie. Tant pis pour la mamma, il enverra des sous. Jusqu’à la mort de la vieille dame il tînt sa promesse. Aujourd’hui, il séchait comme ses chères châtaignes sur son banc de la Vallée des Colons mais il était fier de lui. Il était d’abord monté à Paris pour apprendre la maçonnerie chez un compatriote en attendant d’avoir des papiers en règle. Ensuite ce fut le départ pour la grande aventure. Un des plus gros barrages jamais construit dans le Pacifique était en projet en Nouvelle-Calédonie, une île du bout du monde dont il n’avait jamais entendu parler. Il signa le contrat sans hésiter et débarqua quelque mois plus tard à Nouméa vers la fin de l’année 1955. Il faisait une chaleur humide et étouffante le jour de son arrivée. Un climat tropical d’été austral qu’il découvrait pour la première fois. Après le regroupement des premiers ouvriers, il se retrouvera à l’embouchure de la Yaté après un voyage chaotique dans la benne d’un camion sur une route en terre qui cheminait dans un paysage de terre rouge qui le fascinera. Il y restera quatre années pour couler des tonnes de béton qui serviront à construire le mastodonte barrage pour retenir les 315 millions de m3 du lac. L’italien, Tony le kanak, s’adaptera de suite à cette vie en brousse. Plutôt que d’habiter au campement des italiens, il décida très vite de vivre à l’écart dans une case traditionnelle ronde au toit conique qui lui rappelait son Italie natale. Il était surement le seul européen qui avait vécu dans une case pendant sa jeunesse. Dans sa région, au nord de Bari, les paysans pauvres comme lui habite des trulli. Toute son enfance il habitera un trullo, une case en pierre typique de la région et très semblable aux cases mélanésiennes. Tony se sentit immédiatement proche des indigènes. De plus, l’odeur végétale de la case lui rappelait son metato, le séchoir près du bois de châtaigniers avec le fumet incomparable des châtaignes qui sèchent sous l’effet de la chaleur et de la fumée. Ce fut pour lui sa manière de lutter contre la solitude et le manque d’amour que lui prodiguait sa mère. Elle l’avait marquée au fer rouge avec sa terrible supplique : « che si asciuga le castagne ora ? ». Il l’entendait souvent surtout la nuit lorsque les alizés balayaient le Caillou en s’enroulant autour de son trullo recouvert de peaux de niaouli.

 

On l’avait mis d’office à la retraite. Pépé comme on l’appelait sur le chantier avait fait son temps. Sa vie se partageait maintenant entre son petit studio de la rue Taragnat et son square. Plus personne ne le voyait tandis que lui voyait tout le monde. Il observait les gens. Spectateur invisible, vieillard inoffensif qui n’existait déjà plus pour la plupart de ses concitoyens. Il pouvait observer le film de la vie des autres dans son cinéma permanent, le petit jardin d’enfants, en toute tranquillité.

 

Il connaissait bien son petit monde du square, les gosses turbulents, les mamans anxieuses qui avaient toujours peur de rater la sortie de l’école, les bavardes qui arrivaient joyeuses à l’idée de retrouver une copine ou les amoureux qui se voyaient en cachette et ceux qui affichaient crânement leur amour en étant persuadés que personne n’en avait connu de pareil. Il y avait aussi les autres, les marginaux, les petits dealers, une petite délinquance du petit territoire d’outre-mer en pleine évolution qui ressemblait de plus en plus à la grande délinquance des métropoles lointaines. Il savait tout de cette population qui fréquentait le petit jardin d’enfants de l’école Candide Koch de la rue Taragnat. La rue Sylvain Gargon, perpendiculaire à la rue Taragnat et jouxtant le square et le parking de l’école primaire, lui-même délimité sur un côté par un égout à ciel ouvert nauséabond qui se jetait dans la baie de Sainte-Marie servait de frontière au territoire de prédilection de Tony et des enfants de l’école. Un petit terrain de jeu coincé entre une palissade, deux rues et un parking fermé par un fossé égout infranchissable comme celui d’un château-fort. Cette rue transversale rejoignait la rue Charleroi mais Tony n’allait plus là-bas depuis longtemps, c’était trop loin pour lui. De l’autre coté de cette frontière, il y avait les entrepôts de l’hypermarché Géant et l’arrière-cour d’une autre école, une école pour tout petit, une maternelle au joli nom des Capucines. Tony Vincenti vivait depuis quarante ans dans ce quartier de la Vallée des Colons mais depuis son inactivité forcée son univers s’était rétréci à la seule aire du parc où il tuait ses journées. Dans ce vieux quartier, il y avait moins de changement que dans d’autres. Le quartier Latin était méconnaissable lui avait-on dit. C’était rassurant pour lui. Il trouvait que Nouméa avait changé trop vite. La petite ville provinciale était devenue une vraie capitale avec sa surpopulation, ses embouteillages et tout ce qu’entraîne un développement rapide et un peu anarchique. Mais autour de son square peu de changement mis à part l’installation de l’association Valentin Haüy pour les non-voyants dans un ancien commerce fermé cause Hypermarché. Les clients du centre pour aveugles, peu regardant, ne gênaient pas beaucoup les petits trafiquants et les jeunes tagueurs du quartier.

 

Tony vit arriver de loin la fluette silhouette androgyne encapuchonnée à la mode rappeur. La mode des ados mal dans leur peau qui affectionnent les vestes à capuche pour s’isoler, rester dans un monde secret à la lisière de l’enfance. Ce jeune ou cette jeune traversait à grandes enjambées le parking de l’école en fonçant droit devant, en direction du portillon d’accès au jardin d’enfants tout en balançant ses bras qui rythmaient sa marche forcée. Le petit soldat semblait mu d’une irrésistible volonté d’atteindre un point précis. Pourquoi tant d’empressement en pleine après-midi avec cette lourde chaleur qui incitait plutôt à la nonchalance.

 

Tony regardait avec intérêt la jeune silhouette qui approchait de son parc car il lui semblait la reconnaître. La suite confirma ses doutes, il avait vu juste, c’était bien elle, la petite fugueuse, la gamine rebelle qui flânait sans but en faisant l’école buissonnière. Il y a longtemps qu’il l’avait repéré. Rien n’échappait au vieux du parc comme l’appelaient les enfants. « On dirait qu’elle tient quelque chose de précieux dans sa main ? », pensa-t-il. Il la voyait distinctement maintenant. La gamine approchait du portillon avec une cannette de bière dans la main droite qu’elle ne cherchait même pas à dissimuler. Le vieux Tony s’en étonna car il savait qu’elle traînait mais il ne l’avait jamais vu boire. « Pauvre gamine ! », marmonna-t-il. « Même pas quatorze ans, déscolarisée, abandonnée, livrée à elle-même. Quelle misère ! » La jeune gamine était toujours habillée de la même manière : des claquettes japonaises aux pieds, un short trois-quarts élimé cradingue et un tee-shirt jamais très net et trop ample pour le corps fluet qui laissait deviner des petits seins naissants, deux minuscules bosses cachés sous les pans de la veste ouverte. Avec son parka en tissu la capuche rabattue jusqu’aux yeux, la gamine semblait irréelle, sortie d’un film de Georges Lucas, une héroïne de la Guerre des Etoile. « Que la force soit avec toi, petite », pensa Tony en souriant, car il avait vu sur un tee-shirt d’un gamin de l’école inscrit : « Que la boulette soit avec toi », une version locale de la célèbre réplique.

 

La gamine avec sa bouche en cul-de-poule semblait fâchée et très déterminée. Elle fonçait vers l’immonde toilette publique en plastique qui trônait au milieu du jardin d’enfants, une horreur, une grosse poubelle verte couverte de tags. Ce type de toilettes de chantier repoussantes parsème les lieux publics de Nouméa au grand dam des touristes étonnés de voir ce manque d’hygiène bien français. La môme entra précipitamment dans le cabinet, le « cacabinet » pourrait-on dire. Elle referma, en la claquant, la porte qui se rouvrit en rebondissant à cause de la brutalité avec laquelle elle l’avait ramenée sur elle. Le bras fluet de la gamine réapparut pour la refermer aussitôt avec la même « douceur ». « Bein mon vieux, elle doit avoir une sacré envie pour courir aux toilettes ainsi », marmonna le vieux qui parlait tout seul. N’ayant rien d’autres à faire de s’adonner à l’observation des aller et venues des visiteurs du square et comme il n’y avait que la fille perdue et lui à cette heure de classe, il guetta sa sortie du caisson toilette.

 

Plus de vingt minutes s’écoulèrent. Que pouvait-elle bien fabriquer là dedans ? Il se posait la question avec un peu d’inquiétude. Elle était peut-être malade. Il pensa aussi au suicide, un fléau chez les jeunes mélanésiens. La modernité tuait. La ville avait déstructuré l’organisation tribale des anciens. L’urbanisation avait anéanti les valeurs traditionnelles mélanésiennes. La pléthore de SDF en était la preuve flagrante. Tony Vincenti le savait bien pour avoir fréquenté les mélanésiens dans sa jeunesse. En tribu, les jeunes étaient libres de dormir chez l’un ou l’autre, dans une autre case, celle d’une tante où d’un tonton pour une nuit ou plus. L’hébergement d’une famille à l’autre ne posait pas de problème en brousse. Mais en ville, le jeune qui quittait le logement surpeuplé pour aller dormir chez le cousin ou la tantine finissait par être mangé par la ville. Il disparaissait. Les « mélas », comme disaient certaines personnes péjorativement, perdaient leurs gosses dans la cité. La fillette que Tony attendait était une gosse perdue dans la ville.

 

Il s’impatientait tout en contemplant le bel arbre au centre du parc dont les racines hors de terre forment un monticule, bien sûr ce n’était pas un châtaignier mais il le trouvait beau néanmoins. La bosse, résultante de l’amas de racines, donnait l’impression qu’il avait été planté au sommet d’une colline. La petite montagne faisait le bonheur des bambins qui l’escaladaient avant de se laisser rouler pour revenir au camp de base. Le bonheur des chérubins ravissait Tony. L’insouciance des petits contrastait avec la misère de certains jeunes du quartier, des ados qu’il avait parfois vu jouer aux alpinistes quelques années plus tôt.

 

La gamine rebelle sortit enfin, aussi bruyamment qu’elle avait fait son entrée, de l’immonde réduit. La porte, ouverte avec force, presque arrachée de ses gonds s’écrasa en claquant sur le montant en plastique comme le reste. La jeune fille émergea toujours encapuchonnée en moulinant des bras des gestes désordonnés qui voulaient dire « tu va voir ta gueule ! ». Elle balançait ses bras en s’adressant à des interlocuteurs invisibles, des fantômes peut-être ? Elle maugréait contre Dieu sait quel démon. Elle n’avait pas fait deux pas qu’elle se retourna brusquement pour retourner vers les toilettes ouvertes et récupérer sa boite de bière posée sur le sol. Elle porta la cannette à sa bouche pour terminer le breuvage chaud et balança la boite vide en la shootant comme un footballeur qui saisit une balle au rebond. Tout en s’essuyant la bouche avec le revers d’une de ses manches, elle jeta un regard méchant et provocateur vers le vieux Tony qui la regarda sans baisser les yeux avec la bouche en quart de lune les pointes en bas. « Elle picole et elle dégueulasse le parc », se dit-t-il. « Il n’y a vraiment plus de jeunesse ! ».

 

Brusquement la fille agressive devint fragile, tremblante, apeurée comme une biche aux abois. Elle retombait en enfance, une enfance douloureuse dont elle émergeait à peine. Ses yeux s’emplirent de larmes et elle alla s’assoir contre un muret dans un angle du square. Elle se recroquevilla en position fœtale tout en pleurnichant enveloppée dans son parka. Le vieux se demanda si c’était l’effet de l’alcool qui la mettait dans cet état ou autre chose. Il trancha pour l’alcool : « c’est bien fait pour elle, boire à son âge, quelle honte ! Je vais la dénoncer à une assistance sociale », se dit-il. Il détourna son regard de la gamine pour émietter un bout de pain rassis à l’intention d’un moineau qui s’approchait en sautillant pour avoir sa ration quotidienne. En se relevant, Tony aperçut un groupe d’énergumènes en mouvement sur le parking. Un monastère entier de jeunes encapuchonnés se déplaçait. Le groupe compact comme un banc de poissons ou une volée de moineaux était mobile comme une seule entité dans un accord parfait.

 

L’escouade de moines rappeurs était en chasse. Sept ou huit garçons qui cherchaient quelqu’un. Peut-être une bagarre ? Un voleur à châtier ? Qui était recherché par cette bande de jeunes ? Lorsqu’ils prirent la direction du jardin, Tony devina que la gamine devait être le gibier. Ils entrèrent en jouant aux durs sautant par-dessus le portillon sans l’ouvrir pour montrer leur souplesse. Le vieux, impassible, les observa malgré les œillades hostiles. Les petits cons n’impressionnaient pas le vieil italien qui en avait vu d’autres. Ils trouvèrent rapidement la gamine ramassée sur elle-même qui renâclait dans son coin.

─ Allez lève-toi ! Somma fermement le chef de bande en tentant de la relever en tirant sur sa veste.

─ Foutez-moi la paix, dégagez enculés de branleurs !

 

La phrase hurlée à s’en faire exploser les cordes vocales attira l’attention de deux personnes sur le parking. Les jeunes se retournèrent comme un seul homme pour évaluer le nombre de personnes témoins de la scène. Voyant que les deux hommes du parking ne bougeaient pas, le caïd reprit son dialogue.

─ Fais pas ta maligne petite pute, tu ne disais pas ça tout à l’heure.

─ Fichez-lui la paix, cria le vieux de loin en restant assis sur son banc.

─ Ta gueule vieux débris, occupe-toi de tes oignons, répondit un des lieutenants du chef des moines.

─ Foutez le camp avant que j’appelle les flics, ajouta le vieux.

Le mot flic sembla calmer les jeunes de la bande qui se concertèrent des yeux pour la suite à donner à cette embrouille.

─ Ça va, panique pas vieux, on s’tire les gars. Allez tata vieil couille !

 

La menace des flics et le rapprochement vers le parc des deux hommes du parking avait suffit à faire fuir les brutes qui prirent la direction de la rue Taragnat pour remonter vers le lycée Do-Kamo.

 

La gamine, toujours recroquevillée, pleurait à chaudes larmes. Une femme, arrivée entre temps, s’approcha pour la consoler. Elle reçut une volée d’insultes qui lui fit rebrousser chemin en maugréant. La petite traînée en herbe consciente de faire le spectacle se leva en traitant tout le monde d’enculés, une expression qu’elle semblait affectionner et qui était singulière dans la bouche d’une si jeune fille. Elle quitta le parc la capuche baissée sur ses yeux en enfournant ses mains au fond des poches de la parka. Les témoins restèrent médusés devant un spectacle aussi navrant.

 

Elle se dirigea vers l’immeuble désaffecté, un immeuble aux fenêtres murées en bordure des entrepôts de l’hypermarché Géant recouvert de graffitis, pour méditer et cacher sa honte. Dans cet immeuble, quelques heures plus tôt, la petite fugueuse avait enduré une tournante. Toute la bande lui était passée dessus en la maintenant plaquée debout contre un mur, une pratique courante dans le monde de la rue. Elle venait d’en faire le dur apprentissage.

 

Le vieux la regarda s’éloigner, petit pantin désarticulé qui faisait pitié malgré les insultes qu’elle venait de proférer. « Qu’elle arrête de boire ! », marmonna le vieux lorsqu’elle disparut de son champ de vision puis il se ravisa. Sans avoir deviné ce que la gamine venait de subir, il eut une soudaine envie de l’aider, un désir de charité chrétienne assez fréquent chez lui. Il ne pouvait pas courir après. Trop vieux, trop lent pour la gazelle mais il se promit de lui parler des châtaignes la prochaine fois qu’il la verrait. Il avait souvent parlé avec succès des châtaignes avec des gens en détresse. Les châtaignes avaient marqué son enfance et une histoire de miracle n’était pas étrangère à cet attachement aux fruits du châtaignier. Les châtaignes pouvaient faire des miracles. Il le savait depuis longtemps, sa mère le disait à cause du premier miracle du padre Pio qu’il racontait comme il l’avait entendu :

Padre Pio obtint l’un de ses premiers miracles en 1908.  Alors qu’il se trouvait au couvent de Montefusco, il eut l’idée de cueillir des châtaignes pour sa tante Daria, à Pietrelcina, qu’il aimait beaucoup.  Il plaça les châtaignes dans un petit sac.  Sa tante Daria reçut les châtaignes et les mangea, conservant en souvenir le petit sac.  Longtemps après, un soir, tante Daria approcha d’un tiroir une lampe à huile, pour y chercher quelque chose, oubliant que son mari gardait dans ce tiroir des cartouches d’armes à feu.  Une étincelle s’échappant de la lampe mit feu au tiroir et l’explosion atteint tante Daria au visage. Hurlant de douleur, tante Daria prit, dans la commode, le petit sac dans lequel abbé Pio lui avait envoyé les châtaignes et elle l’appliqua sur son visage.  Immédiatement, la douleur cessa et son visage ne montra, par la suite, aucune trace de brûlure.

Persuader des pouvoirs surnaturels des châtaignes Tony Vincenti arrivait à consoler les gens et à leur insuffler de la force en leur disant : « Vous voyez ces mains », tout en ouvrant ses paumes calleuses. « Elles ont tellement manipulé de châtaignes qu’en les serrant bien fort vous en ressentirez les bienfaits ». Convaincus de sa bonne foi, la plupart du temps les gens serraient fortement les mains du vieux. Cette transmission de chaleur humaine suffisait souvent à remonter le moral en berne des personnes tristes.

 

Tout en songeant à sa prochaine rencontre avec la jeune fille, Tony s’assoupit spontanément comme les vieux savent si bien le faire. L’histoire de la petite fugueuse l’avait épuisé. Il entendit une fois encore sa mère.

─ che si asciuga le castagne ora ?

Si mamma, arrivare , répondit-il

Joël Paul  (En compagnie de J-M Creugnet à gauche sur la photo)