Waminya André, « Je suis » Juil10

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Waminya André, « Je suis »

Etudiant en seconde année à  l’Institut de formation des Maîtres, André Waminya trouve encore le temps de mettre les mots en harmonie pour parler de sa culture, des mythes et de la symbolique kanak, entre le visible et l’invisible ; privilégié par une enfance pleine d’amour et d’enseignements des Vieux, il a acquis très tôt une sensibilité et une appréhension fine du monde ; à l’occasion d’un exercice sur l’identité, il nous offre ce texte plein de spiritualité.

Je suis

Je suis l’énergie, source de lumière qui donne sens à l’espace, le feu qui réchauffe et donne naissance à la parole. Je ne connais pas de mots, mais je crie quand j’ai mal, je respire plus fort quand je suis en colère et ne bouge plus quand je tombe amoureux, pour ne laisser que le chant de ces vagues qui se fracassent contre les falaises de mon île ; elle laisse alors transparaître la plus pure et la plus belle de ses mélodies.

Je suis cette musique qui fit danser la lune, ce jour où elle épousa le soleil, je suis cette musique qui fit jaillir des entrailles de la terre son indescriptible fourrure si mystique et à la fois si douce qu’elle a su donner de la magie à son manteau vert.

Je suis le début et la fin, la vie et la mort, toujours tout et souvent rien, « petit deviendra grand un jour », « mais je reste sans cesse petit pour devenir toujours plus grand ».

Je suis le lien et l’attache, ce cordon ombilical qui rattache l’homme à l’esprit, le visible à l’invisible, le « toi » au « moi », car « toi » c’est « moi » et « moi » c’est « toi », « saito »! « c’est moi toi ».

Je suis la terre qui donne, je suis la terre qui reprend, parce que je donne vie je la reprends, la mort n’existe pas, elle est mon paradis.

Je suis ce paradis, certains l’appellent l’autre monde, d’autres le ciel, pour moi c’est le chemin des ancêtres depuis la nuit des temps. La lueur du crépuscule qui se mêle à l’aurore me guide et pulvérise toute notion du temps, car sur ce chemin plus rien n’a de sens, seul l’esprit, essence de l’être donne un sens à l’existence.

Je suis la femme qui t’a fait homme, de bois et de paille qui te protègent, de flammes et de nattes qui te réchauffent et te bercent durant tes longs sommeils. C’est ce qu’on aime qui est beau, et moi, femme, je t’ai rendu beau, alors je t’aime.

Mais alors, qui suis-je ?

Je suis ce que je suis, je suis ce que j’ai été, et je suis ce que je serai, « ihnim », amour, « metröötr », respect, « ipië  me xou », humilité, un amour né de femmes et qui réchauffe depuis toujours le cœur des hommes.

Waminya André, « Je suis »