Fév11

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Rentrée de l’atelier d’écriture à Païta

Rentrée de l’atelier d’écriture à Païta

Samedi 6 février 2021 Cannelle a repris le chemin du Dock à la rencontre de scripteurs, anciens et nouveaux. Un exercice sur l’actualité récente (tempête Lucas) a donné des variations dont voici quelques-unes.

L’atelier se tient par quinzaine, donc deux fois par mois et une participation de 10 000 frcs par trimestre est demandée pour soutenir l’association. La prochaine séance aura lieu samedi 27-2-2021 de 10 à 12h, au Dock, pour tout public.

 

Comment ai-je vécu la dépression Lucas ?

Mireille Rolly

« Je préfère voir tomber la pluie sur mon jardin plutôt que sur mon rétroviseur » pensa Jacky alors qu’elle conduisait sa petite SWIFT pour rentrer chez elle, ce mardi soir du 3 février 2021. Elle n’aimait pas rouler sous la pluie depuis le décès accidentel d’une de ses amies à cause d’un aquaplaning. La peur la prenait au ventre. Les cinquante à l’heure qu’affichait le cadran de son tableau de bord lui semblait être une performance digne d’un coureur automobile lors d’une course de côte. Des gouttes énormes venaient s’aplatir sur la vitre, supprimant toute visibilité. Les essuie-glaces réglés à leur vitesse maximale ne parvenaient pas  à endiguer le flot continu de l’eau dégoulinante de toute part.

Cette situation lui en rappela une autre, il y a une vingtaine d’années empruntant la Savexpress au niveau de l’ancienne station service de « La Dernière Chance » à la Montagne coupée. Le 4X4 qui l’avait doublé à vive allure,  avait créé une gigantesque vague boueuse, éclaboussant tout son véhicule. Pendant quelques secondes interminables de conduite à l’aveugle, elle avait prié Dieu, seule entité capable de  lui venir en aide lors de cette situation épineuse.

Enfin rentrée chez elle à Païta, elle procéda avec son mari à une dernière vérification, tout semblait sous contrôle, rien ne trainait dans le jardin, les volets roulants étaient descendus et  les tables et chaises de la terrasse couchées sur le sol du deck.

Une soirée TV ordinaire avait suivi. Le souci de la venue de Lucas, dépression tropicale semblait gérable. La maison, robuste et bien close diminuait l’anxiété qui planait par à coup, ça et là. Le phénomène étant prévu pour le lendemain après-midi,  il ne restait plus qu’à prendre du repos et à attendre. Elle avait vu les signes et savait que la dépression allait passer près de chez eux. L’avant veille, les mouches et les moustiques avaient disparu et le soir  au ponant, la « lumière des cyclones » comme elle l’appelait avait été bien visible à l’horizon.

Minuit trente, le vent commença à souffler rudement créant des « à coups » dans le sommeil de Jacky qui devint de plus en plus  léger et perturbé. Le tonnerre s’entendaient au loin.

A cinq heures, les yeux encore à moitié endormis, sa première action fut de consulter les cartes météo et son réseau Face book. Rien de bien nouveau, au vu des cartes, les prévisions semblaient s’avérer correctes.

A six heures, elle ouvrit le volet roulant et put constater la puissance du vent maintenant les palmes de cocotiers à l’horizontale et faisant bouger les arbres dans tous les sens. Le ciel totalement gris et brumeux servait d’écran à des vagues de pluie interrompues. « Un vrai temps de cyclone ou je n’y connais rien. » pensa-t-elle.

Un peu après neuf heures, elle apprit que les routes d’accès à Païta étaient déjà envahies d’eau. L’alerte 1 avait été décrétée à 20h la veille.

La vigueur des éléments en action sema  le doute dans l’esprit de Jacky. Si cela étaient les prémices, comment se passerait  l’après-midi se demanda-t-elle anxieuse.

Elle se rappela alors un moment similaire : Cyclone Erika. Alors qu’elle épongeait l’eau entrant sans discontinuité par ses baies vitrées, elle avait eu comme une illumination et avait compris qu’en fait le cyclone était bel et bien là. Arrivé avec plusieurs heures d’avance sur les prévisions, il avait soufflé le toit du bâtiment du service météo. Cela avait fait les gorges chaudes de toute la population. « A la météo, ils se rendent compte qu’il y a un cyclone que lorsque leur toit s’envole » avait été la blague de la semaine dans toute l’île.

Cette pensée souffla son anxiété, eh bien oui, il était bien inutile de se soucier de ce qui se passerait dans après-midi parce que c’était ici et maintenant que cela se produisait.

Vers onze heures le vent commença à tourner au sud, confortant ses pronostics. A partir de là, elle prit son mal en patience et alla dans la cuisine pour préparer des crêpes. Les crêpes étaient doublement bienvenues pour leur effet anti-stress reconnue et ce jour-là précisément, lendemain de la Chandeleur.

A treize heure l’alerte 2 était déclenchée, mais déjà, les inondations avaient causé de nombreux dommages dans la commune, plusieurs habitations étaient sous les eaux. Des glissements de terrain venaient d’avoir lieu dans le lotissement.

Quinze heures trente, le vent se calma presque d’un coup et la pluie devint intermittente.

Une heure plus tard, après un tour dans le jardin, Jacky et son mari surent que le lendemain ils auraient une grosse journée de travail pour redresser et élaguer les arbres tombés à terre. Un frangipanier ouvert en deux, les implora de lui prolonger sa vie en faisant une bouture d’une de ses branches.

Son jardin en vrac, les témoignages de riverains accablés rendirent Jacky en colère. Sidérée, elle en voulait au système des alertes imposé par la sécurité civile, que les prévisions météo soient erronées n’était pas un souci en soi, ce ne sont que des prévisions mais que l’administration ne soit pas réactive face aux aléas et aux tournures que prennent les événements, cela la rendait furieuse, comme si, c’était le tout premier cyclone du monde, comme si, l’expérience ne servait à rien, jamais.

Le lendemain soir, à l’écoute du journal TV et  au vu des dégâts commis par le phénomène, elle pensa « Il faudrait que les mecs de la cellule de crise ouvrent leur fenêtre de temps en temps ».

Lucas aura donc marqué les esprits et les mémoires :  simple dépression tropicale modérée, qui a eu, quand même, tout d’une grande.

 

Lucas

Carine Barbero

Nous t’attendions, mais tes pluies nous ont tous surpris.

Elles ont commencé par me réveiller.

L’eau s’accumulait, quelques branches ont cassé, rapidement une mare s’est formée.

La rivière se faisait entendre jusqu’à chez moi.

Une petite accalmie, et les pluies ont repris.

L’électricité a sauté.

La 3G m’a permis de vérifier où tu en étais : des images impressionnantes.  Au village, l’eau était montée dans les rues comme dans les maisons. Tes eaux ont été puissantes, elles ont détruit et ravagé.

J’ai pensé à toutes ces personnes, j’ai espéré que les pluies se calment, j’ai souhaité que tous puissent s’en sortir sain et sauf.

Jeudi matin, au volant de ma voiture, j’ai vu les ravages que tu as faits : lit de la rivière emporté, maisons noyées, enfants apeurés,…

Lucas, tu as fait un grand nettoyage.

Je te remercie d’être passé en journée.

 

Attente sereine

Anne-Marie Vanlerberghe

Cris d’oiseaux environnants,

Silence…


Nuages, pluies,

 Bourrasques de vent,

 L’avocatier se plie,

Le frangipanier l’accompagne,

 Les oiseaux sont cachés,

 Plus un chant,

Nuages, pluies,

 L’eau monte, inonde...

 LUCAS … dévorante…